Au tournant du 20e siècle, Sherbrooke est en pleine mutation. La population ne cesse de croître et l’arrivée d’entreprises importantes contribue à dynamiser l’économie. Par contre, le crime aussi foisonne, et ce, tant sous le soleil que sous la lune. Quel portrait pouvons-nous dresser des interventions policières de jour et de nuit entre 1895 et 1920?
Une des casernes de pompiers de la ville de Sherbrooke vers 1890.
C’est à cette question que nous avons tenté de répondre.
En compilant les rapports de police obtenus dans les Day Books, nous avons dressé un inventaire des arrestations effectuées pour les mois de janvier, de juin et d’octobre pour les années 1895 et 1920. Nous avons ensuite regroupé les différents motifs d’arrestations notés par les policiers en catégories générales (d’ailleurs fortement inspirées de celles créées par le professeur Donald Fyson[1]). Au passage, nous avons séparé les crimes survenus entre 22h et 5h des autres crimes. Le tout nous a permis de dresser un portrait global du crime de jour et de nuit à Sherbrooke.
Et les résultats obtenus sont plutôt surprenants.
Les données compilées permettent également de constater que, de tous les types de crimes commis dans la ville, troubler l’ordre public est, de loin, le plus populaire, tant de jour que de nuit, en 1895 comme en 1920. Par rapport à lui, les autres types de crimes demeurent marginaux ― trop, en tout cas, pour pouvoir établir une réelle comparaison, dans notre étude, entre l’occurrence de ces infractions durant le jour et durant la nuit. En tout cas, ce qui est sûr, c’est que la fréquence des interventions policières pour des individus troublant l’ordre public témoigne de la très grande importance de la question du maintien de la paix publique ― les individus arrêtés étant très souvent en état d’ébriété ― alors que le Québec est plongé en plein débat sur la prohibition[2].
[2] Jean-Pierre Kesteman, Peter Southam et Diane Saint-Pierre, Histoire des Cantons-de-l’Est, Sainte-Foy, Institut québécois de recherche sur la culture, 1998, p. 184.
Proulx, Daniel, Juges, policiers et truands: les dessous de la justice au Québec, Montréal, Méridien, 1999, 193 p.